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Félin... bécile

Et la transidentité dans tout cela ?

12 Février 2014 , Rédigé par Scat cat Publié dans #transidentité

Dans un précédent billet, je parlais de l'erreur dont j'ai été victime "à la livraison", expliquant que mon genre ne correspondait pas à mon corps. Pour autant, je n'ai qu'une seule et unique fois utilisé le terme de transidentité, et ignoré royalement ceux de transsexualité/transsexualisme et transgenre.

 

Ces termes existent et, dans l'absolu, tous sont valables pour moi. Mais, justement, le problème est autant dans cet absolu, que dans le fait que trois termes, supposés décrire trois ensembles différents de personnes, sont relativement interchangeables. En ce sens, je ne me reconnais personnellement dans aucun des trois. Pour autant, il est évident que je respecte ceux qui arrivent à s'y reconnaitre. Cela d'autant plus que ce sont probablement eux qui font le plus avancer la cause qui nous réuni de fait. Le problème existe parce que le concept de transidentité touche au couple genre/corps ; il ne peut donc pas être découpé en catégories aussi facilement que la sexualité semble pouvoir l'être.

La catégorisation sexuelle, une chose simple ?

Dans l'inconscient collectif, puisqu'il n'existe que deux sexes, il n'est pas bien difficile de catégoriser la sexualité des gens. Soit ils sont attirés par les personnes du sexe opposé, soit par celles du même sexe qu'eux, soit encore par les deux. Sur le papier cela semble correct ; mais "sur le papier" je suis un homme, donc vous devez vous douter que les choses ne sont pas aussi simples qu'elles peuvent le paraître.

Les avancées socio-psychologiques, autant que l'ouverture progressive des mentalités, a fait apparaître d'autres cas de figure. Ceux-ci ont toujours existés mais, parce que le modèle biologique était purement binaire (homme/femme) et que le modèle social était lui purement hétérosexuel, ils n'étaient pas plus reconnus que ne l'était l'homosexualité (considérée au mieux comme une maladie, au pire comme la preuve d'une possession démoniaque).

Sur le strict plan de l'activité sexuelle, l'on trouve l'asexualité. Par le passé, ce n'était qu'une absence de désir, et non un désir à proprement parler. L'on était une "vieille fille" ou un "célibataire endurci", avec tout ce que cela pouvait avoir de péjoratif, simplement parce que l'on se considérait comme sans sexualité. Quant au plan physique, c'est l'intersexualité qui a fait son apparition. Largement assimilée, à tort, à l'hermaphrodisme, il ne s'agit pas de posséder les deux corps, et donc les deux sexes, en un seul, mais bien d'avoir un corps partagés entre ces deux sexes. La femme à barbe, personnage emblématique des "foires aux monstres" était justement vue comme cela, un monstre, une aberration de la nature, alors qu'elle n'était qu'intersexuée. Même chose pour un homme qui aurait, par exemple, des pectoraux surdéveloppés, non de part la musculation, mais parce que ce sont de vrais seins féminins.

A ma connaissance, il n'existe pas encore d'étude permettant de déterminer si cette intersexualité est purement liée aux anomalies du gène SRY, ou si d'autres facteurs peuvent entrer en jeu. Histoire de compliquer encore les choses, bien qu'ils le devraient, les termes de "femme XY" et de "homme XX" ne sont pas purement réservés aux intersexués. Des transgenres ont utilisés ces expressions pour qualifier leur dualité, avant que leur réalité chromosomique ne se répande réellement hors des cercles scientifiques.

Pour en finir avec la sexualité, et pouvoir en revenir à la transidentité, est apparu plus récemment la notion de pansexualité. Les personnes focalisées sur le seul modèle binaire homme/femme, tendent à ne voir là qu'un autre terme pour désigner la bisexualité. Mais, comme je viens de l'expliquer, il y a sur Terre plus que des hommes et des femmes. La pansexualité n'est donc pas l'union entre l'hétérosexualité et l'homosexualité, mais bien celle de toutes les sexualités possibles. En cela une personne pansexuel est effectivement, basiquement parlant, bisexuelle ; en ce sens qu'elle fait l'amour tant avec des corps (majoritairement) féminins qu'avec des corps (majoritairement) masculins.

Néanmoins, dans la pratique cela signifie que cette personne fait tout autant l'amour avec des hétérosexuels qu'avec des homosexuels, de son sexe ou du sexe opposé, ou encore avec des intersexués. De même, dans le cas d'un(e) partenaire transidentaire, elle pratiquera un acte hétérosexuel/homosexuel, physiquement parlant, tout en pratiquant un acte homosexuel/hétérosexuel, dès lors que l'on se place au niveau du genre de son/sa partenaire. Ce dernier point signifie entre autre que son langage pourra être, en apparence, en discordance avec la réalité et qu'une phrase comme, "ma chérie j'aime te sentir éjaculer en moi", est tout à fait naturelle à ses yeux. Enfin, évidement, un(e) pansexuel(le) peut parfaitement faire l'amour avec un(e) asexué(e) ; sauf que justement dans le cas présent ils ne feront pas l'amour, du moins physiquement parlant.

La transidentité ou les transidentités ?

Maintenant qu'il apparait évident qu'une chose, en apparence aussi simple que la catégorisation sexuelle est déjà ardue, est-il encore de mise d'employer le singulier pour parler de transidentité ? La notion de transidentité se basant autant sur le couple genre/corps, que sur le parcours passé, mais aussi futur, de la personne, les différences entre deux transidentitaires sont aussi nombreuses que celles qui existent entre un homme et une femme. Etant entendu que je parle ici tant des différences biologiques, que de celles dites "non-biologiques" ; mais je reviendrais sur ces notions dans un autre billet.

Wikipédia définit le transsexualisme ainsi : "Les personnes revendiquant ou affirmant une identité transsexuelle expriment le sentiment profond d'être une femme ou un homme contrairement à l'identité associée à ses organes génitaux". Si la définition s'arrêtait là ce serait simple. Les couples homme/femme d'un côté, ceux femme/homme de l'autre, et voilà les transidentitaires catégorisés, pour le plus grand bonheur de la société et des administrations.

Hélas, juste après cette phrase, la définition de Wikipédia ajoute, "la personne peut ou non avoir recours à des traitements hormonaux ou chirurgicaux visant à mettre en harmonie son corps et son identité". Boum, le modèle binaire, pourtant si facile à comprendre et à faire rentrer dans des petites cases, vient d'exploser. Que l'on ait ou pas décidé d'harmoniser son corps et son genre, nous sommes transidentitaires. Cela que l'harmonisation, lorsqu'elle a lieu, soit chirurgicale ou hormonale et, ce qui n'est pas écrit ici, complète ou partielle.

Sont donc considérées comme transidentitaires toutes les personnes nées avec un genre différent de leur corps, cela qu'ils aient ou non suivis la voient de la chirurgie à fin de réattribution sexuelle. Mais aussi qu'ils soient ou non dans une optique de transvestisme, qu'ils se qualifient selon leur genre ou selon leur corps, qu'ils acceptent ou non d'être qualifiés selon leur corps, que leur corps soit masculin, féminin, ou intersexué, et ainsi de suite. Une liste exhaustive, pourtant dépourvue de tout commentaire, demanderait un billet à elle seule.

Autant dire que, oui, idéalement il serait plus juste d'employer le terme au pluriel. Néanmoins ce pluriel n'aurait pas plus de sens que le singulier actuellement de mise. En effet, la langue française se montre très pauvre en la matière. Pour couvrir tous ces cas de figure, tous ces parcours et leurs causes profondes, elle ne dispose, en tout et pour tout, que de trois termes (et leurs déclinaisons). Pire, ils sont, hélas, tous les trois à considérer comme interchangeables.

Que l'on parle de transidentité ou de transsexualisme (préférable à l'ambigüe "transsexualité"), c'est pareil. Même chose lorsque l'on parle des personnes, qui sont indifféremment transidentitaires, transsexuelles ou transgenres. Ces termes disposant d'une définition propre, dans l'absolue ils devraient désigner des concepts différents, mais même la communauté transidentitaire a bien du mal à les définir et les utiliser sans qu'ils ne finissent pas exclure quelqu'un. Alors le grand public, n'en parlons même pas.

Je suis donc à proprement parler transsexuel. Pour autant, un transsexuel ayant poussé la démarche de réattribution sexuelle jusqu'à son terme, et ayant donc maintenant un corps correspondant à son genre, serait en droit de me réfuter ce qualificatif. Il aurait raison, je ne ressens pas cette nécessité, souvent impérieuse, de concordance genre/corps. A l'inverse, je pourrais, moi, lui réfuter le qualificatif de transgenre, puisque maintenant son corps est celui de son genre.

Dans l'absolue, cela semble être la solution. Transsexualisme lorsqu'il y a eu changement de corps, et donc de sexe, transgenre lorsque le genre et le corps sont différents. Cependant, cette solution exclurait du transsexualisme toutes les personnes qui n'ont ressenti la nécessité que d'une démarche partielle ou de la seule démarche hormonale, alors qu'elle regrouperait en tant que transgenres les personnes désireuses d'une reconnaissance officiel de leur genre et celles qui, comme moi, acceptent que la société continue à les qualifier selon leur corps.

En conclusion, nous sommes tous transidentitaires, mais la transidentité ne permet pas de tous nous définir. Pour être plus précis, la transidentité ne permet pas de définir ce que nous sommes réellement, elle ne nous défini que globalement. Les termes ne sont pas à bannir pour autant, car ils offrent une base au militantisme autant qu'à l'approche pédagogique pour laquelle j'ai, moi, opté. Mais ils n'en sont pas moins, selon moi, à utiliser avec parcimonie, faute de quoi le message véhiculé risque de finir par se brouiller. Au final, il deviendrait difficilement compréhensible pour les personnes qui, les premières, doivent l'intégrer ; les personnes qui nous doivent le respect car nous ne sommes pas moins humains qu'eux.

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